dimanche 24 avril 2011


La copie :

                          Sans titre, Olivier Mosset                                              Sans titre, Jessica Pistone
                                                                                                                gommette sur papier
      

lundi 4 avril 2011




"Il faut rendre visible le mécanisme dont la peinture procède"

dimanche 3 avril 2011


Né à Berne, en Suisse, Olivier Mosset entreprend des études d'art à Lausanne, avant de devenir l'assistant de Jean Tinguely et Daniel Spoerri. Il vit et travaille à Paris de 1965 à 1977, puis s'installe à New York, où il joue un rôle d'intermédiaire entre l'Amérique et l'Europe. 

L'œuvre d'Olivier Mosset se veut dès le départ radicale. En 1965, il commence à peindre de petits tableaux verticaux représentant la lettre A en noir sur blanc (exposés en 1966 au Musée d'Art moderne de la Ville de Paris), puis un cercle noir parfaitement tracé. L'artiste participe en 1967 à la formation du groupe BMPT (Buren-Mosset-Parmentier-Toroni), dont le but est de démonter la sacralisation de la personnalité et d'atteindre le degré zéro de la peinture. Chacun des artistes du groupe se borne à peindre un seul motif — Buren, des rayures verticales, Mosset un cercle noir sur fond blanc, etc. — mais parfois, ils s'amusent à peindre les motifs des autres, car, selon Olivier Mosset, la figure conçue par l'un d'eux appartient à tous.

À partir de son installation à New York en 1977, Olivier Mosset peint des toiles monochromes — rouges, oranges, roses ou verts : la peinture est considérée dès lors comme objet. Selon Paul Elie Ivey, l'artiste « se présente comme un non-peintre, dans le sens traditionnel de l'expression, dans la mesure où il revendique le fait de rendre visible le mécanisme dont la peinture procède et qu'il critique le cadre institutionnel de l'art ». Olivier Mosset a également réalisé des sculptures, notamment les Toblerones, qui reprennent la forme des fameux chocolats suisses, tout en jouant avec la référence à l'art minimal.

Olivier Mosset vit et travaille à Tucson (Arizona).



Quelques expositions personnelles importantes

Musée des Beaux-Arts de Rennes (2007)
« Olivier Mosset, Travaux 1966-2003 », Musée cantonal des beaux-arts, Lausanne, Kunstverein, Saint-Galles, Carré d'Art, Nîmes (2003-2004)
Mamco, Genève (1996)
Musée Sainte-Croix, Poitiers, Centre d'Art Contemporain, Châteauroux, Musée des Beaux-Arts, La Chaux-de-Fonds (1985)
Première exposition personnelle, galerie Rive Droite, Paris (1968)


Olivier Mosset un "non peintre"


Le Carré d'Art - Musée d'art contemporain de Nîmes présente une monographie de 36 œuvres datées de 1966 à 1994 d'Olivier Mosset. A travers un parcours formel, l'exposition intitulée Travaux, se réfère autant à la réalisation matérielle, au "faire" mais aussi à ses recherches théoriques de ses débuts à aujourd'hui.

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Vue d'exposition, Biennale de Venise, Pavillon Suisse, 1990
Sans titre, 1989, acrylique sur toile
Collection Andrea Caratsch, Zürich

Olivier Mosset 
s'est placé comme 
témoin privilégié 
de l'évolution 
et de la critique 
de l'objet peinture
"Rendre visible le mécanisme dont la peinture procède" telle est la clef des œuvres de l'artiste suisse. En décembre 1966, quatre jeunes artistes forment le groupe BMPT, initiales de Daniel Buren, Olivier Mosset, Michel Parmentier et Niele Toroni. Ils s'associent jusqu'en décembre 1967 afin de dénoncer l'illusionnisme et la mystification de l'oeuvre d'art et son cadre institutionnel. Le groupe refuse de transcrire une vision ou une interprétation du monde nourrie par les émotions de l'artiste.

En 1964, Olivier Mosset troque le blanc intégral de ses toiles à l'inscription d'un A, première lettre de l'alphabet, degré zéro de la composition et du message. De 1966 à 1975, c'est la forme choisie qui devient signature : un cercle noir de 15,5 cm de diamètre et de 3,25 cm d'épaisseur, peint au centre d'un carré de 1m x 1m. On retiendra cette forme, ce signe, ce symbole de l'aventure BMPT. Chaque toile est exactement identique à la précédente mais est cependant intégralement réalisée pour elle-même (salle 3).

Des monochromes rouges, blancs, jaunes jouent avec l'espace. En effet, Olivier Mosset avec Red Square place l'œuvre dans l'angle de la pièce, tandis qu'un autre monochrome blanc White Ceiling Painting est suspendu au plafond. Ici l'artiste fait directement référence à l'histoire de l'art et aux recherches des artistes aux sources de l'abstraction tels que Malevitch, Vladimir Tatline, ou encore ceux du Bauhaus. Sur les murs trônent des grands monochromes. Ces œuvres sont une interrogation directe sur l'espace, l'espace de l'œuvre, de la peinture, de l'objet mais aussi celui de l'art et du visiteur. Chacune des positions choisies est autant de manipulation possible de l'objet peinture. Olivier Mosset réalise aussi des shaped-canvases, des toiles dont le bord extérieur suit exactement le motif peint. Les shaped-canvases sont le plus souvent des monochromes aux formes empruntées, l'étoile déclinée en rouge, rose et bleue par exemple. La référence à un logo ou un symbole est effacée par un changement de couleur, de position, qui oblige le spectateur à gommer ce souvenir et à ne voir que ce qui est face à lui. Autre jeu d'espace avec le visiteur : la sculpture placée entre les escaliers et l'entrée/sortie de l'exposition. Sans titre (Toblerones) sont six formes identiques, géométriques et imposantes (1.80 m de haut) qui reprennent une œuvre réalisée pour la première fois en carton en 1994 au Musée cantonal des Beaux-Arts de Sion. Enfantées à l'identique des barrages anti-chars conçus par l'armée suisse, elles évoquent également les célèbres barres de Toblerone. Leur fonction de demi barrage dans l'espace n'est qu'un jeu pour le visiteur qui y voit plus une succession de plans grisâtres que de véritables volumes, telle une sculpture leurre. Son oeuvre radicale, minimaliste, s'est prolongée en trois dimensions.
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Sans titre, 1966, acrylique sur toile
Carré d'Art – Musée d’art contemporain de Nîmes


L'avant-dernière salle présente cinq très grandes toiles (4 x 6 m), toutes différentes, n'utilisant que des lignes ou des bandes verticales ou horizontales. Il semble qu'elles soient liées : une grande peinture rose à bande verticale rose plus clair se retrouve presque inversée dans une peinture blanche à deux bandes verticales rouges ; le vert d'une grande toile rayée régulièrement semble se décomposer dans les couleurs d'une toile jaune portant deux barres horizontales bleues. La composition joue entre les toiles qui sont autant d'unité qu'une seule et même œuvre.

La dernière salle fait référence aux collaborations de l'artiste. Par ces voyages, il quitte l'Europe en 1977 pour s'installer au Etats-Unis, ses rencontres sont riches et produisent des œuvres pour le moins surprenantes comme le petit monochrome jaune signé par Andy Warhol qui joue ainsi de sa notoriété. La collaboration avec Cady Noland aboutit à la superposition des "signes" de chacun des artistes : le mur de briques de Cady Noland et la cimaise de Mosset. Olivier Mosset se sert encore avec la signature de l'artiste, ou avec une certaine critique institutionnelle.

Olivier Mosset s'est placé comme témoin privilégié de l'évolution et de la critique de l'objet peinture. Il a traversé et troublé aussi bien les minimalistes que les conceptuels par une recherche incessante de la forme et du fond. Il n'y a pas d'œuvre meilleure ou plus importante que d'autres.
Ouvrez les yeux, tout ce qui est à voir est devant les yeux !
Clément Nouet
Nîmes, janvier 2005








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Lila Square, 1990, acrylique sur toile, 280 x 320 cm. Galerie Les Filles du calvaire, Paris – Bruxelles




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Blue Star , 1993, acrylique sur toile, 197 x 205 cm. Collection Catherine et Gilbert Brownstone. P hoto Pierre Fantys







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Red Square, 1998-1999, acrylique sur toile, 305 x 305 cm. Courtesy Klemens Gasser & Tanja Grunert , Inc



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Vue d’exposition, Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne, 2003 
avec au premier plan Sans titre, 1994-2003, bois peint. Collection de l’artiste et au fond Sans titre [yellow monochrome], 1993, acrylique sur toile, 200 x 400 cm. Collection particulière, courtesy Galerie Bruno Bischofberger, Zurich

samedi 2 avril 2011


Depuis la dispersion du groupe BMPT, Olivier Mosset a maintenu, de façon moins bruyamment polémique, mais aussi intransigeante, l’exigence qui avait réuni les quatre peintres : déconstruire la peinture pour en dire, à l’exemple de Paul Cézanne, la « vérité ». En des termes en apparence seulement réducteurs, il définit la peinture comme ”« de la couleur appliquée sur une toile ». Cependant il ajoute que si, dans sa peinture, « il n’y a pas quelque chose de plus profond, au-delà de ce qui est là », « le fait que ce soit là, c’est peut-être bien déjà "non objectif" ». Une peinture est un objet, mais, à la différence des autres objets, elle a une seule fonction, qui est de provoquer chez le spectateur une réaction spécifique : « En dernière analyse », dit O. Mosset, « c’est dans les yeux du spectateur qu’est l’"art"... ce sont les autres qui font l’œuvre ». Or cette réaction ne doit pas être confondue avec le choc émotionnel et / ou les considérations morales, sociales, philosophiques... que déclenchent les images.


De tout temps, la vérité de la peinture s’est située au-delà de l’image ; aujourd’hui, elle ne peut être dite / perçue qu’en l’absence de toute image. Le spectateur ne la reconnaît, ne « fait » la peinture que si l’objet qui lui est proposé se situe très exactement à la limite qui sépare l’insignifiance, d’une part, de la fiction et / ou du symbole, de l’autre.

En 1966 déjà, O. Mosset crée une telle situation-limite en peignant, au centre d’une toile blanche de 100 x 100 cm, un cercle noir parfaitement neutre, mais dont la présence énigmatique fait percevoir comme peinture un objet visuel minimal. Huit ans durant, O. Mosset reproduit, quelque deux cents fois, ce cercle : manière de tourner en dérision les notions d’originalité, d’unicité, etc., liées à l’œuvre d’art. Mais, effet boomerang, répété de toile en toile, ce cercle prend valeur de logo, renvoyant, au-delà de la réalité visible des peintures, à la présence invisible du peintre. Or il ne doit, dans la peinture, rien n’y avoir « au-delà de ce qui est là ». L’expérience du monochrome (1977-85 environ) va permettre à O. Mosset d’éliminer ce risque tout en serrant de plus près la limite de la peinture.
Mis à part le fait que les toiles sont peintes chacune d’une seule couleur recouvrant uniformément leur surface, O. Mosset veille à ce que tous les paramètres de ses monochromes (dimensions, format, ton) varient d’une toile à l’autre. De plus, il évite de peindre des « toiles uniques », se détachant par quelque originalité du reste de la production, comme d’organiser cette production en séries, qui dénoteraient, « au-delà de ce qui est là », un plan d’ensemble. Enfin, si à la Biennale de Paris en 1977, il peint encore aux exactes dimensions du mur dont il dispose un énorme monochrome rouge, par la suite il refuse, comme incompatible avec l’autonomie de l’objet-peinture, d’établir la moindre relation entre celui-ci et son environnement.

Cependant, ce que le monochrome apporte de nouveau par rapport aux « Cercles », c’est avant tout qu’au lieu de la sacrifier à une démarche conceptualisante, O. Mosset y fait de la pratique de la couleur l’unique vecteur de son travail : « ce qui m’intéresse, c’est le moment où ce qu’on sait bascule dans ce que c’est, cette espèce de perte du savoir dans la matérialité ». Aux États-Unis, au début des années 80, il expose à plusieurs reprises avec les 'Radical Painters'. À partir du rapport nouveau que 'all over' et 'color field' ont établi, surtout dans les grands formats, entre spectateur et surface peinte, ceux-ci ont créé une peinture monochrome d’un grand raffinement tonal. Cependant O. Mosset ne fera avec eux qu’un bout de chemin. L’application 'all over' de la couleur relève en effet, chez les « radicaux », d’une approche « holistique » de la surface peinte et prolonge en quelque manière la gestuelle de l’expressionnisme abstrait : le monochrome libérerait l’essence de la couleur, véhicule premier de l’expression picturale. Or, pour O. Mosset, c’est de vérité de la couleur en tant que pure donnée perceptuelle qu’il s’agit, et cette vérité ne peut être dite que si est éliminé le halo incertain de subjectivité que génère toute recherche d’expression.

En quête d’une couleur soustraite aux aléas des associations et réminiscences, O. Mosset refuse de même de réduire son chromatisme soit (façon 'pop') aux pigments du commerce employés tels quels, soit, à la manière de De Stijl, à un code étroit de tons prédéterminés. Aucun 'a priori' idéologique ne doit influer sur le choix des tons. Ce qui, pour O. Mosset, compte seul, c’est que, étendue sur la toile, la couleur ne dénote que sa propre présence, sa « vérité », selon P. Cézanne. Or ce dire-vrai de la couleur permet de / amène à dépasser le monochrome.

En 1986, cinq très grands formats exposés à Genève illustrent ce dépassement : quatre toiles bichromes plus un monochrome divisé en trois parties par deux traits verticaux. Des « compositions abstraites » donc, mais qui ne se laissent pas plus décomposer que les monochromes (il y a création de rapports, mais non d’harmonies de tons, il y a articulation de structures formelles, mais non formation d’images), et dont l’abstraction n’a rien à voir avec les figures et significations de l’art abstrait classique : O. Mosset la définit par la « littéralité » et l’« autonomie » de l’objet-peinture, dont l’évidence, qu’il soit mono- ou polychrome, est celle, irréductible, du 'ready-made'.

En situant ainsi l’abstraction au-delà de toute imagerie, en traitant l’objet-peinture comme un 'ready-made' assisté, O. Mosset montre que les positions de P. Cézanne et de Marcel Duchamp, loin de s’exclure, se complètent. Si, autant que par le faire spécifique de l’artiste, la vérité de l’art est donnée par le regard spécifique que le spectateur porte sur l’objet, le même statut peut être reconnu à une peinture abstraite et à un arrangement d’objets divers – pour autant que tous deux créent des « situations-limites ». L’apparition, dès la fin des années 80, d’installations monumentales dans l’œuvre d’O. Mosset est certes inattendue, mais s’inscrit impeccablement dans la logique de son travail de peinture.

Bibliographie : 

ecritsMosset.jpg
2005
MAMCO – Ecrits d'artistes
Cet ouvrage rassemble de manière quasi exhaustive les écrits d'Olivier Mosset et les entretiens réalisés avec l'artiste entre 1966 et aujourd'hui.

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2004
Les presses du réel – Art contemporain

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2007
Les presses du réel – Art contemporain
épuisé
Monographie / catalogue documentant les expositions récentes, actuelles et à venir consacrées aux nouveaux travaux d'Olivier Mosset ou à 
l'ensemble d'un œuvre radical et minimaliste. Avec un texte d'Eric de Chassey et un entretien.

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1994 
édition bilingue (français / allemand)
Le Consortium – Catalogues monographiques
épuisé
Catalogue d'exposition.